Bruno Pinchard

Bifurcations et germinations. La Théodicée entre hasard et providence

[Résumé]

On aurait tort de limiter le débat de Leibniz avec la pensée de la Renaissance, et avec les conceptions contemporaines du hasard et de la providence, à la superbe reprise du dialogue de Lorenzo Valla qui clôt l’œuvre et aux variations fameuses auxquelles elle donne lieu. Le débat est explicite dès le début de l’œuvre, dans la requête d’une pensée de la substance douée d’intériorité, dans la volonté de reprendre le débat critique avec le monopsychisme averroïste, dans la présence d’une philologie centrée autour de la mythologie sapientiale d’Hermès, avec ses racines germaniques, celtiques, mosaïques et zoroastriennes, en une vaste synthèse qui prélude aux essais de mythologie comparée. Tous les grands noms des théologiens de la Renaissance, des Réformés et des Contre-réformés, traversent le texte qui, loin de s’en tenir à la répétition de positions unilatérales, cherche toujours le point de vue capable de réconcilier les écoles en une conception complexe de la rationalité et de son rapport aux futurs contingents. Si la raison est expressément définie comme « enchaînement » dans la Théodicée, il faut comprendre qu’elle n’est pas seulement un enchaînement de principes de la raison pure, mais qu’elle est aussi un enchaînement des positions factuelles tour à tour explorées par la pensée de l’humanisme, du moins en tant que celle-ci s’expose, se définit et se conquiert à travers une relation réfléchie à l’infini, c’est-à-dire à un pouvoir d’intégration de l’écart qui va toujours s’approfondissant entre la brutalité des événements et l’harmonie du Meilleur des mondes possibles.

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